Conférence F. Thomas : Itinéraire vers le semis direct... et plus loin

Cet homme n’est plus à présenter mais à écouter. Fondateur de la revue française TCS et agriculteur dans la Sologne, Frédéric Thomas nous a fait l’honneur de donner une conférence en Belgique.

L’événement a rencontré un beau succès. Plus de 200 personnes se sont déplacées pour venir l’écouter.

Il est venu nous rappeler que tout travail du sol perturbe l’activité biologique : élément pourtant essentiel pour avoir une bonne structure de sol et un sol sain. Il nous a présenté le semis direct et nous a expliqué le chemin à suivre pour y arriver. Son exposé a été ponctué de nombreux essais qu’il a ramenés de différentes régions vu son réseau international.

Durant le voyage qu’il nous a fait parcourir, nous avons pu découvrir les nouvelles formes de production agricole possibles. Après avoir rappelé que le sol regorgeait de vie et que c’est, sur cette vie, qu’il faut se reposer, il a évoqué la circulation intra parcelle et les techniques que l’on peut mettre en place pour éviter de compacter. Le principe des couverts végétaux a été plus profondément traité : leurs compositions,  leurs intérêts dans la rotation et comment réintégrer l’élevage pour mieux les valoriser. Différentes solutions nous ont été proposées pour gérer le salissement dans nos parcelles.

 

Vous pourrez trouver ci-dessous les vidéos de la conférence et de la présentation d'une fosse sur une parcelle en semis direct depuis 20 ans.

 

Présentation F Thomas

Présentation Fosse F Thomas

Travail du sol et transition vers le semis direct.

La qualité du sol est un élément qui a souvent été ignoré. La décroissance des taux de matière organique dans les sols a été très lente. Cette décroissance, qui s'est étalée sur 50 ans, a entrainé l’appauvrissement de nos terres. Pour parer à celle-ci, les solutions proposées  se cantonnaient essentiellement  dans l’adaptation des techniques, dans l’augmentation du travail du sol, dans la mécanisation, dans l'apport d'engrais azotés et au niveau de  l’irrigation.

Frédéric, à travers l'exemple d'une parcelle située en Bretagne (photo ci-contre), nous fait la démonstration que, pour une seule parcelle donnée, l'utilisation de 3 techniques de travail de sol différents (de gauche à droite : Labour, TCS, SD),  nous donne 3 qualités de sol différentes en seulement 5 années de différenciation.

 

L'agriculture actuelle se rapproche de l’hydroponie. En effet, on régule nos sols en fertilisant et irrigant par petites doses, afin de compenser les défauts du sol dont on est en partie responsable.

Vers le semis direct ...

Le chemin vers le semis direct n'est pas un long fleuve tranquille. Une période de transition est inévitable. Il est en effet impossible de réaliser un semis direct dans un sol bétonné. Cette transition implique une limitation progressive du travail du sol et une amélioration de notre système de production. La photo ci-contre nous montre une parcelle en transition dans le Lot-et-Garonne.

 

Un élément important à tenir en compte lors du parcours vers le semis-direct est la fin d’azote.  Bien que lagriculture en semis direct sous couvert garde très bien la fertilité, il est à noter qu’on a souvent un manque au démarrage. Les pailles vont prélever des quantités d’azote  non négligeables (comptez +- 15 unités d’azote pour de la paille très carbonée), qui ne sera pas disponible immédiatement pour la culture semée. L’azote utilisé ne sera redonné que plus tard. Lors de l'installation de la culture, cette temporisation de la disponibilité de l'azote est à prendre en considération.

Une solution a été mise en place aux Etats-Unis : le Strip Head. Cette technique consiste à laisser les pailles hautes et à ne récolter que les épis et limite la préhension d’azote précoce.

Une méthode de transition : le strip-till.

Le strip-till consiste à ne travailler le sol que localement. Pour le colza, par exemple, c'est une solution tout à fait adaptée. Lors du semis, la paille est déplacée des rangs de colza et ne gêne alors plus la croissance des jeunes pousses. Le reste de la parcelle est quant à elle toujours protégée par les pailles des intempéries et le développement des adventices est limité. Le système obtenu est tout à fait performant, le colza n’aimant pas les repousses, les pailles et les limaces.

Simplifier le travail du sol, c’est aussi accepter les résidus à la surface qui vont le protéger. Le sol est une sorte d'intestin qui va digérer la matière organique. La rumination de la matière organique se fait à la surface du sol par toute une bande de microarthropodes, carabes etc. qui viennent décomposer les résidus. La matière organique ainsi décomposée va progressivement descendre dans le sol.

Gestion du salissement

L'agriculture actuelle préconise le déchaumage et le labour pour résoudre le salissement des cultures. Or, même si le bénéfice de ces pratiques est visible, le labour ne va pas gérer complètement le salissement, mais il va le répartir et l'homogénéiser dans les profondeurs. Le niveau de salissement moyen correspond à la rotation, aux pratiques de désherbage, aux pratiques culturales, etc. S’il y a un salissement faible, avec le labour cela restera faible. S’il y a beaucoup de salissement, avec le labour cela restera sale. »

L’ensemble des semences des adventices sont naturellement présentes à la surface du sol. La période de dormance de celles-ci est variable et peut être longue pour certaines espèces. Le colza, par exemple, peut attendre 20 ans avant de germer. On comprend donc qu'enfouir les semences des adventices via le labour, ne permettra pas de résoudre le salissement à long terme. A la surface du sol, par contre, on a un système d’épuration des graines plus efficace. Les carabes, pour ne citer qu'eux, peuvent manger entre 1000 et 4000 graines d’adventices par mètre carré et par jour.

Le plus important dans la gestion du salissement, est de développer une technique culturale qui se veut réfléchie. Il est important de toujours associer plusieurs stratégies :

  • Le non labour : pour éviter de remonter un stock grainier. 
  • Maintenir des résidus à la surface.
  • Les biomasses compétitives.
  • Les cultures compétitives pour ne pas laisser trop de place aux adventices.
  • Variation et interruption des cycles : c.-à-d. semer et récolter à des moments les plus différents possibles.
  • Récolter un méteil (mélange fourragé) permet de contrôler les adventices en les récoltant avant leur montée en graines.
  • Une rotation deux par deux : « Pour typer le salissement, pour aller vers un salissement d’été ou un salissement d’hiver. On va ainsi typer le salissement et venir installer une culture qui n’est pas contrainte par ce type de salissement ».

Le labour ne va pas limiter les problèmes existants, il va juste servir de système tampon. Le semis direct quant à lui va avoir un impact  réel sur le salissement.

Les couverts végétaux

Il existe une ressemblance entre la digestion chez les méthaniseurs (vaches…) et les sols. Il faut des rations équilibrées avec des apports qui soient le plus régulier possible. Le couvert végétal en apportant du vert, du sucre et de l’azote va être un moyen de rééquilibrer le sol. La biomasse produite aura un impact sur le taux d'adventices et sur l'activité biologique.

Circulation dans la parcelle et compactage

La circulation des machines agricoles dans les parcelles est aujourd’hui très destructrice. Avec le développement des pneumatiques larges - des pneus basse pression -  nous avons pu répartir leur charge. Mais la basse pression ne change que l’impact du pneu sur le sol, il ne change en rien le poids de l’outil sur le sol. Il faut donc éviter de surcharger !

Cela ne sert à rien de venir décompacter quelque chose qu’on a compacté soi-même. Il est préférable de réfléchir à notre circulation pour limiter le compactage.

Voici quelques exemples de techniques développées pour limiter le compactage:

Répartissement des roues. Voir photo ci-contre (Etats-Unis).

 

Identification des inter-rangs. Exemple : l’agriculteur sème un couvert (trèfle) avant la culture de printemps. Le trèfle sera dans le futur inter-rang de sa culture de maïs ou de soja. Cette technique lui permet de visualiser à l’avance où seront placés les rangs. Lorsqu' il viendra apporter du lisier, il ne roulera pas sur les futurs rangs de maïs ou soja et limitera la compaction.

Gestion de l'eau

Les couverts vont permettre de retenir des quantités d'eau plus importantes qu'un sol nu. Le ruissèlement est ainsi limité.

La photo ci-dessous nous montre la capacité du sol à retenir l'eau suivant le type de couvert

En région où la sécheresse est un problème, la gestion de l'eau par couvert permet de l'accueillir, de la stocker et d'empêcher qu'elle ne s'évapore immédiatement.

Il en sera de même pour les quantités d’azote apporté. Une parcelle sans couvert tendra à perdre plus vite son azote que pour une parcelle avec couvert. L’activité biologique générée par le couvert permettra d’avoir une restitution plus étalée de la fertilisation.

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